Je me reconnais dans le knausgaard, ce n'est pas seulement une génération ou la proximité de nos caractères, une même appétence pour la littérature. Non ce n'est pas seulement une identification de nos jeunesses respectives. J'avais beaucoup aimé le second volume de mon combat même s'il parlait de famille, d'enfants, choses qui me sont assez éloignés. Non si je me reconnais dans le premier volume que je lis en second c'est tout simplement a cause de son père. Je pensais a cela il y a quelques jours quand ma sœur me disait que c'était bientôt le dixième anniversaire de la mort de notre père, je me disais cela l'autre jour, que je n'avais pas vraiment connu mon père. Après j'ai souri en pensant comme il aurait aimé le fantôme et comment il aurait fait le malin; et comment il aurait parlé de woody allen, ou d'une expo quelconque. Mon père adorait les brunes, la seule exception fut ma mère. Mon père aurait fait rire le fantôme, il était assez drôle quand il le voulait, moins que moi bien sûr, mais il était assez drôle. Je crois que mon père ne savait pas trop me parler, ne savait pas trop comment me prendre, sans doute comme son père avant lui ne savait pas trop lui parler. Mon père était déjà un peu vieux quand je suis né, et je crois aussi qu'il était fatigué, avec mes sœurs c'était plus simple, ils combattaient a armes égales. Le même caractère borné, cette insupportable manière de ne jamais lâcher l'affaire. Le problème pour mon père c'est qu'autant mes soeurs avaient le même caractère que lui, autant avec moi ce n'était pas du tout le cas. J'avais le caractère de ma mère. Je crois que c'est pour cela qu'il n'a jamais pu vraiment me parler. Après sa mort cette idée ahurissante m'est venu a l'esprit, d'une certaine manière mon père me craignait. C'est un point en commun qu'on devait avoir, il m'a toujours fait flipper. Je n'aime pas parler de mon père, peut-être parce que parler de mon père c'est parler de moi-même; peut-être parce que c'est mettre le doigt sur une forme de solitude que je ressens aussi. C'est curieux en fin de compte, j'ai aucun problème a parler de ma mère, c'est comme si elle vivait encore en moi, mais je suis incapable de parler de mon père. Je me souviens quand le fantôme me posait des questions je n'étais capable de lui dire que je ne sais pas ou je n'en sais rien, c'est comme si mon père déléguait sa vie sociale a ma mère, comme si au fond il ne s'intéressait qu'a sa vie intérieure. Le dernier mois de la vie mon père, je suis revenu vivre chez mes parents. Quelques jours avant sa mort, je me souviens que j'ai pris sa main et je l'ai posé dans la mienne. Il m'a regardé en souriant. Quelques jours avant sa mort. Je pense souvent a cet instant ou assis sur une chaise au bord du lit, je suis resté près de mon père, ma main dans la sienne, dans une sorte d'adieu un peu avant l'heure. Alors je tourne les pages du knausgaard, j'ai comme l'impression que des souvenirs vont revenir flotter a la surface de ma mémoire. Comme des souvenirs qui vont revenir envahir ma mémoire.