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9 février 2015 1 09 /02 /février /2015 20:34
Des plongeons dans l'amère

Vous auriez vu le capitaine, il dansait tout seul sur son bateau, j'ai pensé qu'il était complètement noir, raide mort bourré dit la vieille qui ne me parait pas très fiable. Je crois qu'il ne tourne plus très rond dit le magicien. Je me dis que la baguette du magicien non plus ne tourne pas très rond mais je préfère la fermer vu que tout le monde l'appelle le magicien sans que personne ne semble croire qu'il le soit. Magicien. Deux choses dit l'intello du port, primo je pense que si le fantôme me quittait je deviendrais complètement barge, secundo je pense que le capitaine n'a jamais pensé que le fantôme le quitterait un jour, je pense qu'il est comme sous le choc. Le vieux que j'ai jamais vu quitté le zinc depuis que j'ai été engagé, fait le philosophe de mes deux, et c'est ce que j'aime bien c'est vraiment de la philosophie de mes deux. Ensemble ils étaient dingues, sincèrement ils étaient aussi dingues l'un que l'autre, comment voulez-vous qu'il devienne normal tout seul. Elle je ne sais pas, le fantôme m'a toujours fait un peu flipper si je peux parler comme les jeunes, mais le capitaine, un type tout rationnel dans son genre, comment voulez vous qu'il s'en sorte conclut le vieux collé au zinc. Ça fait quoi ? un mois ? je crois qu'il n'a toujours pas compris ce qui lui arrive intervient je ne sais plus qui. J'ai jamais vu le fantôme, je suis trop récent sur le port, mais j'ai bien compris qu'ils sont tous complétement largué depuis qu'elle a disparu. Ils n'en mènent pas plus large que le capitaine. Quand au capitaine; les deux seules fois ou il est venu au rade depuis que je tiens le comptoir, il a paru totalement ignorer ma présence. Il a commandé ses cafés et vous savez quoi, je crois qu'il ne me voyait même pas. Sans mauvais jeux de mots on aurait dit un fantôme. Je souhaiterais pas ça a mon pire ennemi dit le magicien sans que je ne sache s'il est sincère ou pas, aucune femme n'osera approcher le capitaine de peur de mourir dans d'atroces souffrances, le capitaine transi d'amour ne pourra jamais approcher lui-même une autre femme. Mais si elle est partie je dis, c'est comme si le capitaine était libre. Tout le monde me regarde comme si j'étais aux portes de la folie. Tu crois qu'elle est partie demande le philosophe. Tu ne la connais pas ajoute le magicien. T'as raison elle est partie dit le vieux. Elle est partie, je n'ai pas vu hyacinthe ces derniers temps souligne le vieux. C'est qui hyacinthe je ne demande pas. Plus tard, quand le capitaine passe prendre un café, tout le monde semble comme un peu emmerdé. Une sorte de rétention anale si vous voyez ce que je veux dire. Tu es nouveau toi me demande le capitaine. Oui je lui dis. Le fantôme t'aurait bien aimé avec ta tête de skater a la con, mais tu n'as pas connu le fantôme n'est ce pas ? Ben non, je réplique un peu énervé parce que je vous avoue qu'ils commencent tous a bien me courir avec le fantôme. Ce qui est bien c'est que du coup je ne te déteste pas, il rigole le capitaine. Enfin il rigole d'un air funèbre je ne vous dis pas. Le truc vraiment con c'est que tu as raté la plus belle femme du monde, il ajoute avec une putain de tristesse dans la voix. Bordel l'intensité avec laquelle il décline ses mots. Tu as raté la plus belle femme du monde, il ajoute. J'en ai des frissons. Tu as raté la plus belle femme du monde, gamin. J'en suis tout ému. La plus belle femme du monde, il répète ce con. Arrêtez capitaine, je lui dis pas, je vais finir par chialer. La plus belle femme du monde, il répète. Et je chiale. Ou peut-être c'est lui. Ou peut-être c'est moi.

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4 février 2015 3 04 /02 /février /2015 10:06
Anatomie bousculaire 45 (camilleri)

Le passé est un prologue je dis a mimi. Enfin non je ne lui dis pas. Le passé est un prologue je dis au capitaine. Shakespeare. La tempête, il me répond de but en blanc. Mimi a déboulé dans mon bureau en me disant que le fantôme avait disparu depuis déjà un mois et que le pitaine était toujours sur son rafiot a attendre je ne sais quoi. Même le magicien il est a la peine me dit mimi. Il a de la peine tu veux dire je demande a mimi. L'important c'est la peine me répond le philosophe dejanté de vigata. Vous voyez quoi je demande au capitaine quand vous regardez l'horizon. L'oscura immensità della morte il répond en bougeant a peine les lèvres. Commissaire il faudrait que vous alliez voir sur le port, le pitaine il est polaire enchaîne mimi. Polaire je demande a mimi en me souvenant de ce rouquin avec sa casquette a l'air un peu ailleurs. Oui commissaire, un jour çi un jour là. Tu veux dire qu'il est bi-polaire je demande. Ah non commissaire il est pas a voile et a vapeur croyez moi, pas du tout, du tout, mais il est d'humeur très changeante. J'ai pas dis qu'il était bisexuel je réplique a mimi je t'ai demandé s'il était bi-polaire. Ah non comissaire se gondole ce cornard de mimi, il est pas bissessuel le pitaine. Vous attendez quoi capitaine. Et vous vous attendez quoi il me répond en réajustant sa casquette alors que je suis assis en face de lui. Il faut aller voir le pitaine, il faut lui dire que le fantôme ne reviendra pas, dit mimi. Et comment tu sais cela toi mimi que le fantôme reviendra pas. Mais commissaire, ça n'existe pas un fantôme me repond ce critin d'un air choqué. Et mon cul de pied dans ce qui te sert de couilles, tu veux voir si ça existe je me mets a hurler d'un air furieux. Après le départ soudain de mimi je me mets en route pour le port. Je sais bien que si j'ai hulé sur lui c'est que je me sens coupable de la disparition du fantôme mais je ne peux pas lui courir après dans le monde entier. La conversation ne dure pas très longtemps avec le capitaine. Vous ne voulez reprendre une vie normale je lui demande. Il me regarde comme si j'étais un criminel de guerre ou un type complétement barjo. Et puis il déclame du melville. J'aimerais mieux ne pas, il répète en boucle. J'aimerais mieux ne pas.

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24 janvier 2015 6 24 /01 /janvier /2015 13:00
Interstices de l'absence

Quoi je demande au vieux en sirotant un verre de porto. J'ai tellement peur de l'ivresse que je bois de l'alcool qui n'est pas de l'alcool. Le serveur s'éloigne en prévision d'une tempête qui n'arrivera pas. Il ne peut pas comprendre que je ne me mettrais pas en colère. Je suis trop éloigné du monde, je suis hors la vie. Pas en-dehors de la vie mais à coté, juste a coté. Le magicien est assis a une table, je vois bien qu'il me jette des coups d’œils furtifs de temps en temps. Je sais que le fantôme lui manque a lui aussi. J'aurais toujours cru qu’il allait danser la tarentelle, faire des bons avec sa baguette quand elle me quitterait. Mais je m'étais trompé. Comme presque toujours dans ma vie. Il est trop malheureux que la plus belle femme du monde ait disparu pour se réjouir de mon désespoir. Quoi je demande au vieux en sirotant un verre de porto. Tellement peur de l'ivresse que je bois de l'alcool qui n'est pas de l'alcool. La vieille carne qui est assise un peu plus loin en faisant des réussites n'a pas eu le cœur de me sortir une vacherie, comme si une période de cessez le feu s'imposait. Je m'en foutrais en plus de ce que l'on pourrait me dire ou ne pas me dire, je suis en dehors du monde, en dehors de ce monde. Enfin juste à côté. Quoi je demande au vieux qui me regarde d'un drôle d'air en sirotant un verre de porto. Vous savez ce que j'étais en train de penser me dit le vieux. Non, et je m'en fous je lui réponds en terminant mon verre pour m'apprêter a retourner sur le bateau. J'étais en train de penser a ce vieux dicton. J'ai pas besoin de regarder le ciel pour savoir le temps qu'il fait. Ça tombe bien je note, moi j'ai pas besoin de t'écouter pour savoir que tu vas me raconter des conneries. Capitaine, vous ne pouvez pas rester dans le souvenir, vous ne pouvez pas, ce n'est pas ce qu'elle aurait voulu. Je m'en fous de ce qu'elle aurait voulu je réponds du tac au tac. Trop vite pour que ça ne fasse pas ressentir de la culpabilité parce que je ne m'en fous pas. Je ne suis pas dans le souvenir je dis au vieux, je suis dans le présent. C'est ce que vous ne pouvez pas comprendre, je suis dans le présent. Le fantôme est mon présent. Je sors du café et alors que je longe les bateaux pour rejoindre le mien, je murmure au silence de la nuit : Tu es mon présent.

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20 janvier 2015 2 20 /01 /janvier /2015 20:10
Anatomie bousculaire 42 (camilleri)

Mais dottori me dit mimi qui semble agité comme si tous les cornards de sicile lui avaient collés des puces au trou de balle, malgré la difficulté de la tâche j'ai considéré quelques thiories de ma fabricacion si dottori il permet. Je regarde l'agité du bancal, et je dis a mimi de s'asseoir pour m'en payer une bonne tranche. Tu as considéré quoi mimi, je lui demande, en me calant dans mon fauteuil pour ne pas en tomber de ma chaise. Dottori sauf votre rispect, il faut que vous compreniez que ce n'est pas une affaire banale. Mais oui, mimi pas banal du tout, c'est bien pour ça que j'ai dépêché mon meilleur limier sur place, je lui assène avec un grand clin d’œil. Oh dottori vous êtes trop bon pour moi, alors je ne vous ai pas déçu. Croyez-moi qu'a peine sur place, j'ai tout de suite foncé sur le bateau de ce capitaine, enfin entre nous dottori, capitaine de rien du tout, c'est pas ça un pitaine. Vous dottori vous êtes dottori parce que vous dirigez un grand commissariat qui rayonne dans toute la sicile, dottori, dans toute l'italie, dottori. Et l'europe et le monde, je rebondis. Oui dottori on peut dire ça. Alors croyiez moi commissari j'ai pas lésiné du tout sur l'enquête, pas du tout lisiné même. Donc ce tas de bois, avec ce capitaine, j'ai été enquête dottori, il est pas très parlant le pitaine dottori. Tu sais, mimi; je crois qu'il est en état de choc, peut-être qu'il ne comprends pas trop ce qui lui arrive. Pit être c'est un acteur, pit être ce pitaine ci comme un américain dottore, pit être qu'il veut l'oscari. Mimi tu ne crois pas que tu vas un peu vite. Il en fait trop ce pitaine dottori, il dit qu'elle a disparu mais il ne dit pas ou, il reste dans son siège sur son bateau, il bouge pas. C'est louche dottori. Je regarde mimi. Mais c'est lui qui a déclaré la disparition du fantôme mimi, tu ne peux pas lui demander ou elle a disparu. Mimi me regarde d'un air curieux. Mimi, il a déclaré la disparition du fantôme, il ne peut pas savoir ou elle a disparu puisque c'est lui qui a déclaré sa disparition. Cébien ce qui me tracasse dottori. Je reste quelques minutes dans mon fauteuil attendant que mimi se réveille de sa rêvasserie. J'ai aussi été voir le fameux magicien dottori. C'est vrai que pour une disparition je note c'est plutôt un bon suspect. Oh non dottori, il n'a jamais rien fait disparaître, vous savez, et d'ailleurs il ne sait rien non plus. Conclusion, Mimi ? Vous savez dottori, je crois que le fantôme a disparu d'elle-même; d'après tout le monde, pirsonne, je dis bien pirsonne dottori, n'aurait voulu que le fantôme disparaisse. Tous amoureux du fantôme dottori sur le port. Et puis d'après tout le monde, le pitaine il n'aimait que le fantôme, et même s'il voulait fricotti avec une autre femme...Et bien mimi ? Pitaine, même s'il voulait fricotti, et bien tout le monde dit que ce n'est pas possible. Et pourquoi Mimi ? N'importe quelle femme saine d'esprit n'irait jamais essayé de fricotti avec le pitaine, dottori, les femmes qui osaient lui parler, subissaient dejà...Subissaient quoi mimi ? Il me fait signe d'attendre et il prend son carnet dont il tourne les pages. Ah voila, une femme qui osait parler au pitaine subissait déjà les pires ivanies, dottori. Avanies, je corrige. Ivanies, avanies, c'est pireil dottori. Je congédie mimi après cet entretien fatigant. Je reste dans mon fauteuil, sachant bien que le fantôme a disparu de son propre fait. J'ai aucune envie de rencontrer le capitaine pour lui dire juste cela les yeux dans les yeux. Alors je me lève et je décide d'aller déjeuner en bordure de mer. Je me dis que le pitaine aussi doit regarder l'horizon. Lui aussi doit regarder l'horizon.

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18 janvier 2015 7 18 /01 /janvier /2015 03:57
L'apparition

J'ouvre les yeux dans un silence de mort et alors que je me dis que je suis sans doute mort, le premier machin que je vois c'est le magicien qui tient sa baguette a bout de bras et qui dit il ouvre les yeux, il ouvre les yeux. Et je me dis que si quand on meurt la première chose que l'on voit c'est le magicien je préfère encore être vivant. Et puis je ferme les yeux et je me dis que je vais mourir, et je me demande ou je suis, et je rouvre les yeux et je vois le crétin de serveur du port qui me dit capitaine vous êtes là capitaine, des fois que je sois ailleurs, et puis il me prend la main ce con et il me la serre bordel il me fait mal et il me dit vous êtes avec moi capitaine comme si j'étais un putain de mort en sursis. Alors je ferme les yeux et je comprends que je ne suis pas mort et que je suis allongé sur un canapé du bar pourri et je me demande ce que je fous la. Alors je ferme les yeux et j'essaie de reprendre mes esprits et je me souviens que le fantôme a disparu et tout de suite ça me vrille le cœur et le cerveau. Et j'ouvre les yeux et je reprends mes esprits, et je vois le vieux penché sur moi qui me dit ça va capitaine, et je me redresse un peu et je dis ou est le fantôme. Cinq minutes plus tard le serveur m'a amené un café offert par la maison qu'il m'a dit comme si c'était le plus grand événement du siècle, et après tout c'est peut-être le cas, et je suis assis sur le canapé pourri du rade. Les joueurs de cartes ne jouent plus aux cartes, la baguette du magicien est comme suspendu dans l'air, et le serveur assis en face de moi semble me regarder comme si j'étais le premier rouquin qu'il voyait de sa chienne de vie, et après tout c'est peut-être le cas, et je trempe mes lèvres dans le café. Le vieux qui a bien compris que je ne suis pas d'humeur, quitte son zinc et vient s'asseoir près de moi. On vous a trouvé sur le port allongé, capitaine, on vous a vu quitté votre bateau, descendre comme un fou, et puis courir sur le port. Courir après rien du tout, et puis vous êtes tombé, et vous n'avez plus bougé. Alors on vous a amené ici, capitaine, on vous a allongé sur le canapé et on vous a amené ici. J'ai vu le fantôme je dis. Je vois bien le vieux qui regarde ses chaussures, le magicien qui regarde sa baguette. Je vois bien les joueurs de carte qui regarde ailleurs, le serveur qui s'aperçoit qu'il a des verres a essuyer. J'ai vu le fantôme je vous jure, elle marchait sur le port; j'ai vu le fantôme alors je lui ai couru après. Le petit magicien vient s'asseoir près de moi sur le canapé du bar, il me regarde ému, on dirait presque qu'il va me prendre la main. Bordel il va me rouler une pelle ou bien. J'ai vu le fantôme et je lui ai couru après, je répète. Capitaine, dit le petit magicien, je vous jure que si je pouvais je donnerais ma vie pour que le fantôme apparaisse maintenant, je vous jure capitaine, je donnerais ma vie. Je la prends ta vie je lui dis pas, je la prends ta vie pour que le fantôme apparaisse. Elle était là je répète alors que le magicien s'en retourne vers le zinc en dodelinant de la tête comme si j'étais dingo, alors que le vieux regarde ailleurs, alors que les joueurs de cartes jouent aux cartes. J'ai vu le fantôme je vous jure je répète au vide. J'ai vu la plus belle femme du monde je répète dans le vide. Je t'ai vu je répète encore au vide.

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15 janvier 2015 4 15 /01 /janvier /2015 09:59
L'horizon, un peu

Je suis assis sur le pont du bateau, je regarde l'horizon. Je regarde et je ne vois rien. Je pourrais aller au bar pour vider quelques godets mais c'est la dernière chose que j'ai envie de faire, pleurer sur mon sort et raconter ma vie a tout ces alcooliques. Alors j'attends, assis sur un des transats du pont du bateau, j'attends que l'horizon se remplisse d'une présence, j'attends qu'un visage apparaisse, que la plus belle femme du monde se dessine dans le brouillard. Des gens passent devant le bateau, je les entends murmurer, parano que je suis, je crois les entendre parler, on doit dire que je suis en train de devenir fou. Le magicien arrive au loin, j'espère juste que c'est son chemin qui le fait passer par mon bateau, et qu'il n'a pas décidé de venir me parler. Il arrive, il semble ralentir en approchant du bateau alors que je me fige, je le vois qui semble vouloir prendre le ponton. Nos visages se croisent a quelques dizaines de mètres de distance. Il comprend que ce n'est pas le moment, et je le vois qui rebrousse chemin, pour la première fois de ma vie, je le trouve raisonnable, je le vois qui retourne vers le bar. Le temps s'écoule, je n'attends rien, je me me maudis de n'avoir pas su comprendre le tourment qui envahissait le fantôme, je m'en veux de n'avoir pu l'aider alors que la tempête se levait au loin. C'est dur a accepter mais je suis responsable. Le vieux se pointe a la nuit tombante, c'est la première fois que je le vois en dehors du rade je me dis, la première fois qu'il n'est pas collé a son zinc. La plus belle femme du monde serait fière d'elle je me dis, si elle savait qu'a cause d'elle le vieux a quitté le bar. Vous ne pouvez pas rester ainsi capitaine me dit le vieux, après s'être assis dans un transat, petite crevette toute rabougrie, il faut sortir un peu, venir au café, on parlera. Je hausse les épaules. J'aimerais mieux pas, je lui dis. Quoique que dans certaines traductions bartleby dit j'aimerais mieux ne pas. C'est comment en anglais, i want prefer not to. C'est pas la première fois que le fantôme disparaît, il dit, elle va revenir, c'est pas possible autrement. Je lève un peu la tête vers l'horizon vide. Je regarde le vieux. Les mots que je vais lui dire arrivent a mon cerveau. Mon coeur s'arrête de battre. Dans un souffle, je lui dis : Et si elle ne revenait pas ? Le vieux me regarde comme si j'étais totalement devenu fou. Alors la voix pleine d'effroi, je lui répète : Et si elle ne revenait pas ?

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14 décembre 2014 7 14 /12 /décembre /2014 19:47
Sur mesure

Le vieux lâche le zinc, le magicien suspend sa baguette en l'air, et les joueurs de cartes arrêtent de jouer. Il y a un silence assourdissant alors que je referme la porte du café et que je me dirige vers le zinc. Un silence assourdissant résonne dans le bar alors que je m'appuie sur le comptoir et que je demande un irish coffee. J'ai besoin d'un verre, j'ai besoin d'un peu d'alcool mais si le fantôme sent que j'ai bu elle va croire que je plaisante, le fantôme a décidé pour toujours que l'influence de l'alcool était incompatible avec la sincérité. Le temps que le serveur prépare l'irish coffee j'aurais le temps de faire trois fois le tour du port, vu que je suis tombé sur le serveur le plus lent du monde. Je peux vous dire quelque chose capitaine me demande le vieux. Non je réponds alors que le serveur se décide a poser enfin un irish coffee sur le comptoir alors que nous sommes déjà au quatrième millénaire. Les joueurs de cartes ont repris leur activité. Je peux vous dire quelque chose me demande le serveur. Non je réponds en récitant mon laïus dans ma tête et en serrant la boite dans ma poche de veste. C'est dommage c'était pour un compliment soupire le type en passant un coup d'éponge sur le zinc. Moi aussi renchérit le vieux. Le petit magicien ramène sa fraise vu qu'on ne lui a rien demandé. Il y a un bal ce soir ? évidemment tout le bar se gondole. Une célébrité vient visiter le port et une tenue correcte est exigée pour assister a la visite ? Je lève les yeux au ciel pendant que tout le bar continue de se gondoler et je serre la boite dans ma poche. Vous savez capitaine me dit le magicien, je vous ai vu rentré plusieurs fois chez le tailleur un peu plus loin et je me demandais ce que vous alliez y faire. Un costume sur mesure souffle le vieux, un putain de costume sur mesure. Je ne trouve jamais de costard a ma taille j'explique, j'ai trop d'épaules, trop de bide, trop de cuisse, alors j'ai été chez le vieux tailleur arménien, pour me faire faire un costume sur mesure. Mais pourquoi vous saper comme un milord me demande le vieux. Je serre la boîte dans ma poche. Je finis mon irish coffee. Je les laisse avec leurs interrogations. Je serre la boîte dans ma poche qui contient l'alliance, et les genoux tremblants je marche vers le bateau pour demander a la plus belle femme du monde si elle veut devenir ma femme. Pour demander au fantôme si elle veut m'épouser. M'épouser.

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3 décembre 2014 3 03 /12 /décembre /2014 09:31
Le banquet

Je rentre dans le rade a moitié vide (tu m'étonnes), il ne reste que les vieux joueurs de cartes et le très vieux collé au zinc qui boit ses bières, il ne reste que ceux qui n'ont plus d'illusions. Le serveur est nouveau mais je vois rien qu'a ses yeux qu'il sait qui je suis et je lui demande un kir en posant mon âme essouflée et mon coeur en fusion sur le bar. Ah capitaine me sourit le vieux, c'est pas le meilleur jour de l'année pour vous. Non j'approuve, c'est même le pire. Le magicien n'est pas la (tu m'étonnes), les morts de faim ont désertés le bar et le port. C'est le seul jour ou je serais heureux de voir le magicien, j'explique au vieux. Il serait là, je lui paierais même un verre. Ca ne peut pas arriver, dit le vieux, il ne peut pas être dans le rade un jour pareil. Hé non, je soupire en demandant un autre godet. C'est vrai que c'est calme dit le serveur, on m'avait prévenu remarquez, c'est le jour du banquet. Les autres cons de serveur doivent y être je me dis, comme il est nouveau on ne lui a pas laissé le choix. Vous avez déjà vu le fantôme je lui demande ? Hé non, il répond. Ah c'est pour ça que vous n'y êtes pas dis le vieux alors que mon coeur s'écrase par terre. La veille j'ai essayé de négocier avec le fantôme, j'ai essayé de lui faire renoncer a cette tradition débile et annuelle du banquet. Mais enfin mon amour a dit la plus belle femme du monde pour m'amadouer, faible homme que je suis, tu sais bien qu'une fois par an je déjeune avec tout ces gentils garçons, c'est juste un jour par an, elle me dit, tout les autres jours je déjeune et je dîne avec toi. C'est comme une tradition. A la con j'ai pensé tout bas. Elle rigole quand je lui dis que je ferais manger sa baguette au petit magicien s'il tente de l'embrasser. Elle rigole encore quand je lui dis de bien demander aux morts de faim de rester a un mètre d'elle. Je maudis cette tradition du jour des morts au faim. Je paie une bière au vieux en attendant que le temps passe. J'espère qu'ils vont tous s'empoisonner je me dis. Et mourir dans d'affreuses souffrances. D'affreuses souffrances.

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28 novembre 2014 5 28 /11 /novembre /2014 22:27
Le dernier souffle

C'est quoi votre putain de problème me demande le magicien a peine je suis rentré dans le bar. C'est quoi son putain de problème a lui je demande au vieux en lui offrant une bière. Mais c'est quoi votre putain de problème me menace le magicien de sa baguette tragique et agité. Il écume bordel, on dirait la tempête sur belle-île, je demande au serveur de me filer un jack daniel's de luxe. Bordel c'est quoi votre putain de problème capitaine me hurle le petit magicien. Il est vraiment colère me dit le serveur. Et toi c'est quoi ton putain de problème je demande au magicien qui est si rouge qu'on dirait le père noël en novembre. Le vieux pose sa main sur mon bras et me regarde d'un air dépité, je peux comprendre sa réaction me dit le vieux toujours collé au zinc, je peux comprendre sa réaction. Comment ça je demande au vieux ? Mais bordel de quoi vous parlez ? Et je me rends compte que j'étais sans doute fatigué ce soir mais que tout le monde m'a jeté un air un peu froid, je me rends que les gens m'ont salué d'un air impersonnel, je me rends que les joueurs de cartes semblaient maussade. Le serveur semblait contrarié mais le putain de serveur de ce putain de bar semble toujours contrarié, comme s'il faisait de la rétention anal. Je paie une bière au vieux, je vide mon godet cul-sec, je dis au magicien d'aller se polir la baguette ou il veut et je demande au vieux collé au zinc ce qui se passe. C'est le fantôme il me dit. J'ai pas eu trop le temps de m'occuper du fantôme ces derniers temps, je dois jeter a la mer tous les morts de faim avec les pieds collés dans le ciment pour ne pas qu'il remonte a la surface, je dois surveiller tout ces types qui ne rêvent que d'obtenir un rendez-vous ou un baiser ou je ne sais quoi d'autre de la plus belle femme du monde. Quoi le fantôme je me dis en culpabilisant déjà car je sais bien qu'alors que je nettoyais de la surface de la terre la race des morts de faim je ne m'occupais pas du fantôme. Le magicien dit qu'elle pleurait assise sur un banc du port, elle disait que vous alliez la quitter, que c'était mieux comme ça. Elle semblait ravagé de tristesse. C'est quoi ce bordel je demande au vieux. Tout le port dit que vous allez quitter le fantôme, la laisser seule, tout le monde vous déteste parce qu'elle dit que vous êtes un miracle, que vous êtes l'homme le meilleur qui n'ait jamais existé, elle répète que vous êtes le paradis sur terre. Et vous allez la quitter capitaine, ça ne se fait pas de quitter un femme pareille, une femme qui vous aime autant. Tout le port est choqué vous savez. Je fonce vers le magicien et je lui demande ce qui lui prends de raconter tout ça. Que j'ai quitté le fantôme, que je l'humilie ainsi. Capitaine si je mens je veux bien manger ma baguette ou me la mettre dans l'orifice de votre choix, il explique alors que le bar et moi-même sommes un peu grimaçants alors que les images défilent devant nos yeux, des images ou le magicien s'enfile la baguette par un des orifices non prévus a cet effet. Capitaine, je pensais que ça me rendrait euphorique le jour ou vous quitteriez le fantôme, vraiment, j'ai imaginé tant de fois cette journée. Je pensais que je serais l'homme le plus heureux du monde. Tout le bar semble suspendu aux paroles du magicien alors que j'ai juste envie de le jeter a la mer et de le maintenir sous l'eau jusqu’à ce qu'il ne respire plus. Mais je m'étais trompé capitaine reprend le dingo de la baguette, elle semblait ravagé de douleur, elle semblait si malheureuse, je n'ai ressenti aucun bien-être. Je déteste dire ça capitaine, mais j'étais triste, tellement triste de la voir ainsi. Je sors du rade et je fonce vers le bateau. Je crois que je préférerais être mort plutôt que de quitter le fantôme. Je monte sur le bateau, je suis un peu furieux mais surtout je suis inquiet. Elle n'est pas sur le ponton, elle est dans la cabine, elle semble dormir, je voudrais la réveiller et lui demander ce qui se passe mais je ne peux m'empêcher de la regarder dormir. Un spectacle a couper le souffle. La réveiller ce serait briser cet eden qu'elle atteins parfois, la réveiller ce serait briser ce bien-être qui semble l'envahir. Je la regarde dormir, et toute la nuit, je sais bien que je vais la regarder dormir. Toute la vie, je sais bien que je vais la regarder dormir. Toute ma vie.

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19 novembre 2014 3 19 /11 /novembre /2014 18:34
Les morts (de faim)

Je commande un kir au comptoir en ricanant toujours, c'est comme si je ne pouvais plus m'arrêter de ricaner, et le vieux a mes côtés ricane aussi sans savoir pourquoi mais en espérant sans doute que je vais le rincer a l’œil s'il m'encourage. Je ricane encore. Venez comme des ombres et repartez de même, je déclame. Gilbert montagné ? demande le vieux collé au comptoir. Non shakespeare je ricane, macbeth. Vous avez l'air en pleine forme capitaine me dit le magicien en me serrant la baguette. Je ricane toujours. Vous attendez quelqu'un je demande exactement une heure auparavant sur un parking en plein vent. Le type auquel je m'adresse est un grand dadais a l'air niais et insipide comme un présentateur de journal télévisé. Et oui il me dit en rayonnant de bonheur. Profite mon pote je ricane déjà intérieurement, rayonne bien, profites en, crois moi. Et vous attendez qui j'ajoute en ricanant intérieurement. Une heure avant d'être au comptoir en train de vider mon kir je ricane. La plus belle femme du monde il ajoute en tirant presque la langue. Il va vraiment falloir que je travaille un peu plus je me dis et que le fantôme ne soit pas obligé de vivre en promiscuité avec tout ces excités de la braguette, déjà qu'on a le neuneu de la baguette au port. Je me demande je commence...Oui dit le gars qui semble irradié de bonheur et ne parait pas du tout se demander ce que je fous la. Je me demandais je reprends, c'est quoi votre putain de problème dans cette boîte de morts de faim, vous n'avez pas de femmes, vous êtes tous moches, je comprends pas ce que vous avez tous a être en train de la sorte dès que vous voyez le fantôme. Le type me regarde d'un drôle d'air au moment précis ou je lui assène un pain dans la tronche avec mon poing américain. Sers m'en un autre, je demande au serveur en regardant l'horloge, je sais que dans dix minutes je dois partir et rejoindre la plus belle femme du monde, je veux être avec elle au moment propice. Caché derrière mon arbre, je guette les autres morts de faim pour surveiller qu'ils partent tous, je vois partir la fée clochette et puis la plus belle femme du monde apparait et pendant quelques instants la pluie cesse de tomber. J'attends que sa voiture devienne une lumière au loin et je vais à ma propre voiture pour extraire du coffre le grand dadais que j'ai ficelé comme un saucisson. Il saigne du nez parce que j'y ai été un peu fort avec le poing américain mais c'est aussi bien comme ça, il sera défiguré et encore mois beau que d'habitude. Vous êtes qui putain il me demande pendant que je l'attache a un arbre pour qu'il soit aux premières loges tout a l'heure. Je suis le capitaine je réponds alors qu'il me regarde interloqué. Bien sur cette andouille intercosmique ne connaît pas mon existence, le fantôme ne parle pas de moi puisque je n'existe que pour le port, que pour ce havre de paix que nous seuls connaissons. Mais bordel qu'est ce que je vous ai fais, il demande. Oh tu ne m'as rien fais je lui explique. Tu ne m'as rien fais du tout. Je t'attache de manière préventive et je vais faire sauter un seul de vos deux immeubles de manière préventive. Mais bordel vous êtes dingue, il me dit. Vous êtes quel mouvement ? Le f.d.d.f. j'improvise. C'est quoi bordel comme mouvement ? Le front de défense du fantôme j'explique. Je termine mon kir en rigolant. Je sors du bar en souriant sous l’œil suspicieux de tous les habitués et je longe tranquille les bateaux sur le port pour rejoindre la plus belle femme du monde. Voila le message j'explique au grand dadais au nez en sang, la prochaine fois que tu attends le fantôme, la prochaine fois que toi ou un de tes semblables vous osez faire des allusions ou la moindre avance au fantôme, je fais sauter l'autre immeuble avec vous tous dedans. Tu m'as compris ? Il me regarde toujours d'un air ahuri. Je te tiens pour personnellement responsable de la tranquillité du fantôme je dis, si toi ou un de tes congénères vous continuez de faire les malins, je vous enferme tous dans l'autre immeuble, et je le fais péter mon pote, et je vous regarde tous frire comme des churros a la fête foraine. Tu vas faire passer le message je lui demande ? Mais l'autre crétin saucissonné est bloqué en mode ahuri. Je pénètre sur le bateau. Le fantôme est en train de faire les comptes dans la chambre et comme c'est l’élégance faite femme, elle ne dit rien même si elle que notre situation financière est trop précaire pour que je me permette d'aller vider deux kirs au rade du coin. Elle est fatigué et je sais qu'elle travaille au milieu des morts de faim pour que je puisse garder mon bateau. Alors que je me sens comme honteux de cette situation, on entends un grand boum au loin et alors qu'on sort sur le bateau la plus belle femme du monde me dit tiens on dirait que ça vient de la direction de mon travail. Ah oui je ricane en lui prenant la main sans un frémissement de tout mon être, si ça se trouve c'est ton immeuble qui a sauté et tu n'auras pas besoin d'aller au travail demain. On regarde le port qui sort du café et tout les marins qui déboulent sur leur ponton. Je devine hyacinthe qui me fait un énorme clin d’œil dans le noir. On croirait vraiment que ça vient de mon travail me dit la plus belle femme du monde. Oui on croirait vraiment que ça vient de là-bas je dis en ricanant intérieurement. On croirait vraiment que ça vient de là bas. Et je serre la main de la plus belle femme du monde. Et je lui serre la main pendant que ça brûle au loin.

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